Association pour la Qualité de la Science française (QSF)

Propositions pour 2007

 

Avant les échéances électorales du printemps, l’Association pour la Qualité de la Science française (QSF), fondée en 1982 par Laurent Schwartz afin de promouvoir l’inventivité et l’excellence de l’enseignement supérieur et de la recherche en France, souhaite rappeler les priorités pour l’Université qui s’imposeront aux futurs gouvernants.

 

Pour l’autonomie et la responsabilité des universités

L’autonomie des universités inscrite dans la loi de 1984 n’est ni effective ni efficace. Fondée sur une répartition ministérielle bureaucratique et égalitariste des moyens et des habilitations, elle donne lieu à des comportements irresponsables dans certains établissements. QSF réclame une vraie autonomie qui favorise l’émulation entre les universités et les incite à des choix responsables, notamment en matière de recrutement des étudiants et des enseignants.

La contractualisation pluriannuelle engageant les universités envers le ministère ne suffit pas à leur pilotage, car les résultats ne sont pas systématiquement pris en compte dans les décisions nationales et locales. L’autonomie réelle des universités exige pour contrepartie une évaluation régulière, indépendante et compétente, servant à ajuster le financement des formations et des laboratoires. L’évaluation doit intervenir à tous les niveaux, global, par discipline et par formation, par laboratoire et pour chaque enseignant-chercheur. Les universités doivent être comptables de tous leurs choix.

Des expérimentations ou des dérogations devraient permettre aux universités mûres pour un statut d’autonomie et de responsabilité d’en bénéficier sans attendre.

 

Pour un meilleur gouvernement des universités

Les universités n’ont pas les moyens d’un fonctionnement efficace ; le président est élu par des conseils eux-mêmes élus sur des bases généralement syndicales et politiques ; les enseignants-chercheurs sont sous-représentés dans ces conseils au profit des autres catégories de personnel et des étudiants. Le président, élu par un collège où les enseignants-chercheurs seront majoritaires, conduira une politique à long terme pour son établissement. Le conseil d’administration deviendra un conseil d’orientation stratégique et ne ressemblera plus à un comité d’entreprise.

 

Pour une orientation sélective

Tout jeune a droit à une formation post-baccalauréat, mais l’entrée à l’université doit faire l’objet d’une orientation active, voire d’une sélection. Les universités sont ouvertes à tous, sans que le baccalauréat assure un niveau minimal. Elles sont donc forcées d’accueillir des étudiants dont on sait au départ qu’ils sont condamnés à l’échec (notamment les bacheliers professionnels). En sciences et en lettres, il est anormal que les universités, qui disposent du corps enseignant le plus qualifié, n’aient pas la possibilité de choisir leurs étudiants comme le font toutes les autres formations supérieures.

 

Pour une politique des droits d’inscription

La quasi-gratuité des études supérieures, à la différence de la gratuité du primaire et du secondaire, n’a pas d’effet redistributif ; elle n’est donc pas conforme à la justice sociale. La modulation des droits d’inscription est le seul système équitable : le coût des études doit être financé suivant les besoins par des bourses et des prêts permettant aux étudiants venant de milieux défavorisés de poursuivre des études supérieures dans de meilleures conditions qu’aujourd’hui.

 

Pour la convergence des universités et des grands organismes de recherche

Le financement des universités et des grands organismes de recherche est insuffisant, mais son augmentation ne saurait aller sans réformes de fond.

Comme dans le monde entier, le financement de la recherche doit se faire en partie sur projets. La création de l’Agence nationale de la recherche (ANR) va donc dans le bon sens à deux conditions : que le financement des laboratoires ne soit pas excessivement dépendant des thèmes définis par l’ANR ; et que celle-ci consacre un part importante de ses crédits à des projets de recherche « blancs », aux thèmes laissés à la libre appréciation de chaque laboratoire en fonction de sa propre politique de recherche.

Les organismes doivent cesser de recruter à vie et s’ouvrir à la mobilité, suivant un statut unique de chercheur-enseignant recruté dans une université et détaché pour une période déterminée, éventuellement renouvelable, dans un organisme de recherche.

L’évaluation des unités comme des personnels doit être unifiée afin de renforcer la mobilité. QSF juge insuffisants les dispositifs de convergence entre universités et organismes prévus par la loi de 2006 sur la recherche, notamment en matière d’évaluation des unités (AERES), de recrutement des enseignants et des chercheurs, et de gestion des carrières.

QSF met toutefois en garde contre une organisation du financement et de l’évaluation de la recherche indifférente aux particularités des disciplines. La recherche en droit et en biologie ne s’évalue pas de la même manière.

 

Pour une revalorisation matérielle et morale du statut des universitaires

Les conditions matérielles de l’enseignement et de la recherche en France sont inférieures à celles des pays comparables. Les meilleurs cerveaux d’une génération ne seront pas attirés par l’enseignement et la recherche si les traitements ne sont pas réévalués et si les services d’enseignement, les charges d’examen et les responsabilités administratives ne sont pas modulés en fonction de la productivité et de l’inventivité.

 

Pour une meilleure école

Aucune réforme des universités n’aboutira sans un redressement de l’école. À la sortie de l’enseignement primaire et secondaire, une proportion inacceptable d’élèves ne maîtrise ni les savoirs fondamentaux ni les bases du raisonnement. Instruments d’une politique malheureuse menée depuis une trentaine d’années, les Instituts universitaires de formation des maîtres ont aggravé les échecs de l’école. À défaut de la suppression des IUFM, leur intégration aux universités ne sera profitable que si celles-ci exercent pleinement leur tutelle administrative et pédagogique. La formation disciplinaire des futurs professeurs doit être renforcée ; la didactique des disciplines – un professeur des écoles doit par exemple apprendre comment enseigner les sciences aux enfants – doit se substituer aux sciences de l’éducation ; les concours nationaux doivent être maintenus.

 

QSF attend des candidats aux élections présidentielle et législatives qu’ils se prononcent sur ces priorités.

 

Avril 2007